Chronique du temps passé n° 30
Quand le curé de Grandvillers allait dire messe à Brouvelieures...
paru dans bulletin municipal de janvier 2021
Les archives nous apprennent que pendant plusieurs années (XVII° siècle), la paroisse de Brouvelieures dépendait de la cure de Grandvillers. A cette époque, tous les dimanche, le curé du village partait à pied à travers la forêt du côté de Ptinrupt, escaladait la montagne de Fouchon puis redescendait vers le village de Brouvelieures. Cela prenait quelques heures et pour ne pas être seul, il se faisait accompagner par des enfants de choeur de Grandvillers jusqu'à mi-chemin puis par les gamins de Brouvelieures pour la 2° partie. Dans ce village il existe toujours une rue qui s'appelle le chemin du prêtre en souvenir de ce passage.
L'histoire rapportée ici se passe en été 1620 et est rapportée et illustrée par une série de trois cartes postales. En effet, bien que l'évêque de Toul n'aurait érigé la chapelle de Brouvelieures en sucursale dépendante de Grandvillers qu'en 1678, il existait déjà depuis 1509 un traité entre les Brouvillois et le curé de Grandvillers qui autorisait le prêtre à célébrer des messes dans la chapelle à la réserve des dimanches des Rameaux, de Pâques ainsi qu'à Toussaint et Noël où les paroissiens devaient obligatoirement se rendre à l'église mère de Grandvillers.
Editées par un nommé Thomas Greffier (imprimerie Adolphe Weick à St Dié) les cartes à ma disposition sont manuscrite en 1914 et ont donc été éditées antérieurement. Je n'ai pas d'information concernant cet auteur ni de ses sources mais la description de l'histoire est bien détaillé et les dessins des cartes semblent infantiles, on peut penser qu'il pourrait s'agir d'un enseignant ayant demandé à ses élèves d'illustrer une ancienne légende ?? Mais sans doute s'agit-il plus de Jean -Baptiste Thomas qui était greffier de paix et secretaire de mairie à Brouvelieures et qui a écrit une monographie sur son village en juillet 1897 (ref ADV 11T16/57)
En ces temps-là donc, tous les
dimanche, le curé de Grandvillers
allait donc dire messe à la chapelle
de Brouvelieures. Il est dit que ce
jour-là, sous un soleil de plomb, après
avoir gravi le sentier escarpé
jusqu'en haut de Fouchon, le saint
homme s'assit à l'ombre
d'un vieux chêne non loin d'un
ermitage et s'assoupit... Pendant ce
temps, les gamins qui l'accompagnaient
allèrent jouer dans les ruines de la
chapelle St Sebastien et St Roch où ceux
de Brouvelieures capturèrent une
couleuvre. Pour impressionner
les enfants de Grandvillers, ils
écorchèrent la pauvre bête et arborèrent
fièrement le cadavre du serpent.
Mais le curé se réveilla et réprimanda
violemment les Brouvillois en les voyant
avec cette dépouille. " Cruel que vous êtes,
pourquoi avoir écorché cette bête inoffensive...
Ne craignez vous pas qu'on vous surnomme "les écorcheurs de couleuvre" ou dit-il pour mieux se faire comprendre en patois "les scouchous d'colûves"
A ce moment-là les petits Grandvillois, déçus de ne pas avoir fait une aussi belle prise se mirent à haranguer les gamins de Brouvelieures et à crier à pleins poumons "Scouchous d'colûves... Scouchous d'colûves ! " et l'echo de la forêt répéta sans cesse ce cri... qui resta dans la tradition à tel point que pendant trois siècles, ce qualificatif allait survivre. Le bon curé de Grandvillers avait ainsi définitivement baptisé les Brouvillois... C'était des "scouchus d'colûves ..."
J.Strubhardt 15-09-2019
Sources:
Jean Baptiste THOMAS
greffier à Brouvelieures juillet 1897
cartes Weick St Dié
Eric TISSERAND Les paroisses
dépendantes du chapitre de
Remiremont sous l'ancien
régime. Mémoire 1994